Pour l’exercice de leurs mandats, les représentants du personnel, qu’ils soient élus ou mandatés par les syndicats, bénéficient d’un nombre d’heures de délégation ou « crédit d’heures ». Retrouvez ici un point complet sur les heures de délégation : qui en bénéficie ? De combien d’heures de délégation disposent les membres élus du comité social et économique et les délégués syndicaux ? Est-ce qu’en tant qu’employeur vous pouvez contrôler ces heures ?
Heures de délégation CSE : définition, droits et cadre juridique
Quelle est l’utilité des heures de délégation pour les représentants du personnel ?
Les heures de délégation sont des heures pendant lesquelles les représentants du personnel vont s’absenter de leur poste de travail pour exercer leurs fonctions représentatives : rencontrer les salariés, mener des enquêtes en cas d’accident du travail non grave, aller à l’inspection du travail, mise en place des activités sociales et culturelles proposées par le Comité Social et Économique, etc.
A noter que le temps passé en réunion du comité social et économique ou en négociation collective n’est pas décompté des heures de délégation, tout en restant payé comme du temps de travail.
Sur quelles bases légales reposent les droits à délégation ?
Ces heures sont accordées selon l’article L. 2315-7 du Code du travail :
- Aux seuls membres titulaires constituant la délégation du personnel du Comité Social et Économique ou CSE.
- Aux délégués syndicaux.
- Aux représentants syndicaux dans les entreprises d’au moins 501 salariés.
Sauf accord d’entreprise plus favorable, les membres suppléants n’ont pas de crédit d’heures au titre de leur mandat ainsi que les membres du Comité social économique (CSE) central.
Quels sont les droits et devoirs des élus et de l’employeur ?
Les élus titulaires du CSE disposent d’un crédit d’heures de délégation mensuel qu’ils peuvent utiliser librement dans le cadre de leur mandat (sans autorisation préalable). Pendant ces heures, ils sont considérés comme étant en temps de travail effectif, avec maintien intégral de leur rémunération.
L’employeur, de son côté, ne peut pas s’opposer à l’usage de ces heures, sauf en cas d’abus manifeste (utilisation en dehors des missions représentatives, absence de justification en cas de contrôle, etc.). Il peut toutefois demander un état récapitulatif des heures utilisées qui précise les dates et les horaires, sans exiger le détail des activités menées.
Les articles R23DELE14-1 et suivants du Code du travail identifiant 3 grands principes légaux à retenir :
- Crédit d’heures mensuel garanti aux membres titulaires du CSE, proportionnel à l’effectif de l’entreprise
- Utilisation libre dans le cadre du mandat, sans demande préalable, mais avec la possibilité pour l’employeur de demander un relevé récapitulatif
- Protection légale forte contre toute entrave ou sanction liée à l’exercice du mandat représentatif.
Combien d’heures de délégation pour les élus du CSE ?
Tableau récapitulatif selon la taille de l’entreprise
Le crédit d’heures varie selon le mandat et l’effectif de l’entreprise ou de l’établissement. Un accord collectif (accord de branche ou d’entreprise) ou les usages peuvent toutefois fixer un crédit d’heures plus favorable que obligations selon les effectifs.
Les membres titulaires du CSE bénéficient d’un crédit d’heures qui dépend de l’effectif de l’entreprise :
De 11 à 49 salariés | 10h |
---|---|
De 50 à 74 salariés | 18h |
De 75 à 99 salariés | 19h |
De 100 à 199 salariés | 21h |
De 200 à 499 salariés | 22h |
De 500 à 1499 salariés | 24h |
De 1500 à 3499 salariés | 26h |
De 3500 à 3999 salariés | 27h |
De 4000 à 4999 salariés | 28h |
De 5000 à 6749 salariés | 29h |
De 6750 à 7499 salariés | 30h |
De 7500 à 7749 salariés | 31h |
De 7750 à 9749 salariés | 32h |
De 9750 à 10 000 salariés | 34h |
Ce crédit d’heures légal peut être augmenté en raison de circonstances exceptionnelles, tel qu’un projet de licenciement collectif.
Concernant les délégués syndicaux qui sont désignés par les organisations syndicales représentatives, ils bénéficient des heures suivantes :
- de 50 à 150 salariés : 12h
- de 151 à 499 salariés : 18h
- 500 salariés et plus : 24h
Dans les entreprises de 501 salariés et plus, le nombre d’heures de délégation des représentants syndicaux est fixé à 20 heures par mois, sauf circonstances exceptionnelles.

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Comment adapter les heures via un accord d’entreprise ou de branche ?
Le Code du travail autorise les partenaires sociaux à aménager librement le volume d’heures de délégation via un accord d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche. Ces accords peuvent prévoir :
- une augmentation ou une mutualisation du crédit d’heures entre élus ;
- une répartition plus souple des heures entre titulaires et suppléants ;
- des droits spécifiques pour les représentants syndicaux ou membres du CSE central.
Attention, ces adaptations ne peuvent en aucun cas diminuer les droits légaux des représentants, sauf accord majoritaire en respectant les seuils de validité définis par le Code du travail !
Quels changements en cas d’établissement distinct ou multi-sites ?
Dans les entreprises organisées en établissements distincts, chaque site peut avoir son propre CSE local, avec un crédit d’heures défini en fonction de l’effectif de chaque entité.
Par ailleurs, un CSE central est obligatoire si plusieurs CSE coexistent : ses membres bénéficient également d’un crédit d’heures dédié.
En cas de multi-sites éloignés géographiquement, le temps de trajet peut être pris en compte dans les heures de délégation s’il est utilisé pour l’exercice du mandat.
Modalités d’utilisation des heures de délégation
Peut-on fractionner ses heures ?
Oui, les représentants du personnel peuvent tout à fait fractionner leur crédit d’heures, en fonction de leurs besoins et de l’actualité du dialogue social. Les heures peuvent être prises en plusieurs fois dans le mois, à condition que l’exercice du mandat reste compatible avec l’organisation du travail. Un élu peut également regrouper ses heures sur un mois ou les mutualiser avec un autre élu si un accord ou le règlement intérieur du CSE le permet.
Le bon de délégation : bonnes pratiques
Le bon de délégation est un document que l’élu transmet à l’employeur pour l’informer de l’utilisation de ses heures. Bien qu’il ne soit pas toujours obligatoire, il est fortement recommandé pour assurer la transparence et éviter les litiges.
Un bon de délégation doit indiquer :
- le nom de l’élu concerné ;
- la date et la durée de l’absence ;
- le motif (exercice du mandat, réunion, enquête, etc.).
Délai de prévenance : usages recommandés et jurisprudence
Aucune règle légale n’impose un délai de prévenance formel pour l’utilisation des heures de délégation. Toutefois, la jurisprudence et les usages professionnels recommandent d’informer l’employeur en amont, dans un délai raisonnable (sauf urgence).
En pratique, prévenir 48 heures à l’avance est souvent bien perçu pour faciliter la continuité du service. Les tribunaux considèrent qu’un refus abusif d’utilisation des heures par l’employeur (ou une exigence de prévenance trop stricte) peut constituer un obstacle à l’exercice du mandat, sanctionnable.
On peut identifier 3 erreurs fréquentes à éviter concernant le délai de prévenance :
- Oublier de prévenir l’employeur : même si la loi ne l’impose pas, prévenir en amont reste une bonne pratique pour éviter les tensions ou les refus.
- Envoyer une info trop vague : un simple “mandat” ne suffit pas toujours. Précisez la durée et l’objet de la délégation.
- Ignorer les pics d’activité : utiliser ses heures en pleine période critique sans concertation peut être mal vu. Anticipez le planning de travail et échangez avec vos collègues !
Report, mutualisation et cumul d’heures : ce que vous devez savoir
Comment fonctionne le report sur 12 mois ?
La durée du crédit d’heures est indiquée mensuellement, mais il est possible de reporter les heures de délégation non utilisées, dans la limite de 12 mois.
Ainsi, le représentant du personnel peut reporter les heures de délégation non prises, sans pouvoir disposer dans le mois plus d’une fois et demie le crédit d’heures de délégation dont il bénéficie.
Par exemple, si un élu dispose de 10 heures par mois, il peut reporter ce crédit d’heures et le consommer dans un délai de 12 mois sans pouvoir dépasser un crédit d’heures mensuel de 15 heures. Il peut toutefois fractionner les heures reportées sur plusieurs mois.
Le représentant du personnel doit en informer l’employeur au plus tard 8 jours avant la date prévue de l’utilisation des heures de délégation reportées.

Mutualisation entre élus : règles, limites, exemples
Les membres titulaires du CSE peuvent mutualiser les heures de délégation en se répartissant entre eux les heures de délégation :
- soit entre membres titulaires,
- soit au bénéfice des membres suppléants, qui ne bénéficient pas en principe de crédit d’heures.
Cette mutualisation doit être portée à la connaissance de l’employeur en précisant
- le nombre d’heures réparties au titre de chaque mois.
- l’identité des membres concernés.
Et ce au plus tard 8 jours avant la date prévue pour l’utilisation des heures de délégation.
Cas des élus cumulant plusieurs mandats (CSE, DS, RSS…)
En cas de cumul de mandats, il y a cumul des heures de délégation.
Ainsi, un membre élu du CSE peut cumuler son mandat avec celui de membre élu du CSE central, de délégué syndical, lorsque l’effectif de l’entreprise est d’au moins 300 salariés ou lorsqu’il est de moins de 50 salariés, auquel cas ce cumul est automatique, de représentant de la section syndicale ou de membre du comité de groupe, du comité d’entreprise européen ou du comité de la société européenne.
Dans ce cas, il bénéficiera d’un crédit d’heures affecté à chaque mandat.
Attention au plafond de 1,5x par mois ! Même en cas de report ou de cumul d’heures de délégation (report sur 12 mois ou cumuls de mandats), le total d’heures utilisées sur un mois donné ne peut pas dépasser 1,5 fois le crédit mensuel initial.
Cas particuliers à ne pas négliger
Élus suppléants : ont-ils des heures de délégation ?
En principe, les membres suppléants du CSE ne disposent pas de crédit d’heures de délégation, sauf si un accord collectif ou un usage dans l’entreprise le prévoit. Toutefois, ils peuvent bénéficier d’heures mutualisées si des membres titulaires leur en transfèrent une partie. En effet, les suppléants assistent aux réunions du CSE uniquement en l’absence d’un titulaire (sauf disposition plus favorable dans l’accord d’entreprise).
Temps partiel : règle du tiers et exemples concrets
Les salariés à temps partiel disposent du même nombre d’heures de délégation que les salariés à temps plein sans toutefois que leur temps de travail ne puisse être réduit de plus d’un tiers par l’utilisation du crédit d’heures auquel ils peuvent prétendre.
Si le représentant du personnel est sous le régime du forfait annuel en jours, le crédit d’heures est décompté en demi-journée, soit l’équivalent de 4 heures de délégation.
Contrats courts, intérim, CDD : quelles sont les conditions ?
Les représentants du personnel en CDD, intérim ou contrats courts peuvent (sous certaines conditions) bénéficier d’heures de délégation s’ils sont élus au CSE ou désignés délégués syndicaux. Leur mandat s’exerce dans la limite de leur contrat de travail.
Concrètement, ils ont les mêmes droits que les salariés en CDI pendant la durée de leur mission ou contrat, y compris pour participer aux réunions, exercer leur mandat et utiliser leurs heures de délégation. Attention, car leur mandat prend fin automatiquement à l’expiration de leur contrat (sauf en cas de renouvellement immédiat ou de requalification en CDI).
Exemple : Julie, élue suppléante à 80 % dans une entreprise de 120 salariés, peut-elle utiliser des heures ?
Oui, dans deux cas :
- Elle remplace temporairement un titulaire indisponible : elle bénéficie alors de son crédit d’heures pour la période concernée.
- L’accord d’entreprise accorde des heures aux suppléants : Julie pourra alors utiliser les heures prévues, au prorata de son temps de travail si l’accord le précise.
Heures de délégation : rémunération, contrôle et litiges
Les heures sont-elles rémunérées systématiquement ?
Les heures de délégation sont considérées comme du temps de travail effectif et rentrent donc dans le calcul de la durée du travail des représentants du personnel. Elles sont rémunérées en tant que telles, à échéance normale (lors du règlement du salaire).
Pour le calcul de la rémunération des heures de délégation, le Code du travail pose comme principe que le salarié titulaire d’un mandat ne doit subir aucune perte de rémunération du fait de ses missions de représentation du personnel.
Le crédit d’heures de délégation peut être utilisé pendant le temps de travail, mais également en dehors du temps de travail, si l’exercice du mandat le nécessite. Dans ce dernier cas, ces heures de délégation sont rémunérées en heures supplémentaires avec droit à la contrepartie en repos.
Le représentant du personnel peut utiliser son crédit d’heures pendant un arrêt maladie sous réserve de l’autorisation de son médecin traitant à exercer son mandat. Dans ce cas, il y a cumul de l’indemnité maladie et du paiement des heures de délégation.
En revanche, si les heures de délégation sont utilisées pendant les congés payés, il n’y a pas cumul entre indemnité de congés payés et rémunération des heures de délégation.
Les heures de délégation doivent être payées à échéance normale, mais l’employeur ne doit pas les faire figurer sur le bulletin de paie (article R. 3243-4 du Code du travail). La nature et le paiement des heures de délégation sont mentionnés dans une fiche annexée au bulletin de paie.
Que peut vérifier l’employeur a posteriori ?
La question du suivi et du paiement de ces heures de délégation représente un enjeu fort pour les services RH et paie des entreprises.
Il est possible de mettre en place un contrôle de l’utilisation du crédit d’heures, en concertation avec les représentants du personnel.
Il ne peut s’agir en aucun cas d’un système d’autorisation préalable d’absence pour l’exercice des fonctions représentatives ou de contrôle a priori de l’utilisation des crédits d’heures de délégation. Un tel système constituerait un délit d’entrave.
En effet, les représentants du personnel n’ont pas à justifier de l’utilisation du crédit d’heures afin de réaliser leurs missions. Ces heures de délégation sont dédiées à l’exercice des fonctions représentatives uniquement et ne peuvent bien évidemment pas être utilisées à des fins personnelles.
Il existe une présomption de bonne utilisation de ces heures, l’employeur doit donc payer les heures de délégation déclarées et seulement après en réclamer le remboursement en rapportant la preuve d’une utilisation inadéquate, comme par exemple, le cas d’un élu qui assistait aux entraînements de foot de son fils en utilisant ses heures de délégation pour s’absenter de son poste (CA Caen 7 juillet 2022 n°21/00097).
Les représentants du personnel doivent toutefois informer l’employeur avant l’utilisation des crédits d’heure, en respectant un délai de prévenance qui variera en fonction du poste occupé.
Pour comptabiliser les heures de délégation, certaines entreprises ont mis en place les bons de délégation, à savoir un formulaire remis au supérieur hiérarchique où sont indiquées la nature du mandat, l’heure du départ et l’heure probable de retour. Là encore, il ne s’agit pas de contrôler l’opportunité de l’utilisation des heures, mais bien d’avoir un décompte du crédit.
Un tableau de suivi des heures de délégation est également nécessaire pour comptabiliser les heures affectées aux représentants du personnel et piloter les éventuels reports ou mutualisations entre les élus du CSE.
Quels sont les recours en cas de litige ou de refus ?
Le non-paiement à échéance est considéré comme un délit d’entrave engageant la responsabilité pénale de l’employeur. Le représentant du personnel peut saisir le conseil des prud’hommes en paiement des heures de délégation qui lui sont dues par la voie du référé prud’homale et demander le paiement de dommages et intérêts.
Le refus de paiement des heures de délégation peut justifier une prise d’acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur qui, si elle est considérée comme justifiée, aboutira à la requalification de la rupture du contrat en licenciement sans cause réelle avec paiement des indemnités afférentes.
Que faire si l'employeur conteste ? Le représentant du personnel doit justifier l’utilisation effective de ces heures et peut produire un bon de délégation signé (ou tout autre élément probant). En cas de litige persistant, le recours au référé prud’homal permet d’obtenir une décision rapide sur le paiement des heures dues.
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